Où il est question d’une bataille, d’un tremblement de terre et de religieuses peu assidues à la tâche
La bataille de Rocourt (1746)
Les recensements du curé de Glain (ici) m’ont finalement permis d’identifier un frère et une sœur aînés de mon aïeule Anne Catherine MESTREZ, alors que je battais un peu le beurre à ce niveau. En 1736, en effet, il note que Gertrude MAGHUIN, veuve MESTRE, vit avec trois enfants : Gertrude (16 ans), Gérard (14 ans) et Anne Catherine (11 ans). A l’époque, la paroisse compte 292 familles, soit 1.237 « âmes », parmi lesquels 905 « communians » (sic) environ et 322 « non communians ». Je présume qu’il s’agit là essentiellement des enfants de moins de dix-douze ans, les mécréants étant rares à l’époque. Mais là n’est pas tant mon propos que l’auteur de ces lignes.
Comme ses annotations le laissaient présager, j’ai, en effet, découvert que Martin BIDELOZ (1697-1760), curé de Notre-Dame-des-Lumières, avait la plume aisée et s’est plu, tout au long de son sacerdoce, à noter mille et uns faits, mineurs ou plus importants, ayant eu lieu dans sa paroisse entre 1728 et 1759, notamment ses conflits avec les religieuses dominicaines qui lui semblaient éviter certaines de leurs charges envers l’église. Rassemblés sous le titre « Liber Memorialis » à l’usage de ses successeurs, ces données constituent la source essentielle de l’histoire de Glain, quartier rural de Ans sur les hauteurs de Liège dont la Révolution industrielle allait profondément bouleverser le paysage un siècle plus tard. On y découvre notamment un tremblement de terre dans la nuit du 26 au 27 décembre 1755, mais également le récit de la terrible bataille de Rocourt, village voisin d’Ans et Glain, les 10 et 11 octobre 1746, alors que Anne Catherine MESTREZ avait donc 21 ans. Cette bataille restée célèbre opposait les troupes françaises et autrichiennes pendant la guerre de succession d’Autriche.
Martin BIDELOZ écrit à ce propos : « Le choc fut terrible, car ces derniers fuirent en grand désordre. Les Français culbutèrent l’arrière-garde autrichienne jusques en Montfort et du côté de la Croix de Pierre d’Ans avec un horrible feu qui dura jusqu’aux ténèbres de la nuit. Le lendemain, 11 octobre, le feu recommença vers les 6 heures du matin et les deux armées qui s’étendaient ordre de bataille depuis les Hayes d’Ans jusqu’à Vottem se battirent avec acharnement. La déroute des Alliés s’en suivit. Les fuyards étaient poursuivis jusque dans les prairies d’Ans. De mon clocher, je les voyais tomber et périr misérablement sur le coup de la mousqueterie et de la baïonnette… les soldats vinrent fourrager dans toute Sainte-Marguerite jusques en Glain, vers le chêne Varlet, ma paroisse. Mais pour le reste d’icelle, elle fût, grâce à Notre-Dame-des Lumières, notre patronne, exempte de toute disgrâce ».
Ainsi, grâce à un prêtre minutieux, une infime portion de l’histoire de mes ancêtres m’est livrée. Les Archives de l’Etat à Liège possèdent quantité de manuscrits de sa main qu’il serait intéressant de consulter un jour. Je n’en suis pas là, toute affairée que je suis encore à pister les grands-parents d’Anne Catherine MESTREZ, Noël MAGHUIN et Adèle BORET, ainsi que les parents de son époux Gérard LERUTH, dont je ne sais toujours pas d’où il a surgi, la génération spontanée ne semblant pas de mise.