Tristes destins
La porte et le faubourg Fauroeulx (le Quesnoy)
Je l’ai déjà écrit : à force de déménager de villages en ville et de ville en villages, mes arrière-arrière-grands-parents ch’tis Emmanuel DELFOSSE et Clotilde DEHOVE m’auront donné bien du fil à retordre. Souvenez-vous : après être passés par Neuville-en-Avesnois où Marceline poussait son premier cri en 1856, par Preux-au-Bois où mon arrière-grand-mère Augustine était née en 1858, par Hecq où Domitien était né en 1860 et par le Quesnoy où Eugène avait vu le jour en 1865, je les avait laissés en 1886 à Walincourt, où Eugène décédait à vingt ans à peine en février et où Domitien se mariait en octobre. Les actes relatifs à ces deux événements m’avaient en outre permis d’établir que Clotilde y tenait un café. Ensuite ? Mystère. Emmanuel et Clotilde ne figurent pas au recensement de 1906 à Walincourt. Or, je n’y trouve le décès ni de l’un ni de l’autre entre 1886 et 1906. Donc, ils avaient déménagé une fois de plus. Oui, mais où ?
Je cherche dans les villages avoisinants. En vain. Habitent-ils avec l’une de leurs filles aînées, Marceline ou Augustine ? Peut-être, mais j’ignore ce qu’est devenue Marceline et, même si je la retrouve plus tard, j’ai perdu toute trace de mon aïeule à cette époque de sa vie : elle ne figure pas au recensement de 1906 à Valenciennes, où elle a pourtant habité au moins jusqu’en juillet 1904, lors du mariage de mes grands-parents.
Quand on tombe sur un tel nœud généalogique, mieux vaut ne pas insister. D’autres idées viendront ultérieurement et, qui sait, de nouveaux documents seront peut-être mis en ligne. De toute façon, pour d’évidentes raisons autrement plus contemporaines, je n’ai plus vraiment la tête à la généalogie depuis plusieurs mois.
Vient le jour où renaît l’envie de s’y mettre. Alors, je tapote sans réel espoir, sans but précis, les divers noms de mes ancêtres sur le site de l’Eglise de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, autrement dit des Mormons, grands pourvoyeurs devant l’Eternel d’infos généalogiques gratuites. Et là, miracle ;-) ! Alors que j’ai déjà introduit à maintes reprises et sans résultat jusqu'ici le nom d’Elisa MALVOISIN, la sœur de ma grand-mère, dont je cherche depuis longtemps la date et le lieu de décès, voici qu’il s’affiche… accolé à celui de Clotilde DEHOVE. Stupeur ! Le document est un extrait du recensement de 1906 de Jolimetz, un village proche du Quesnoy. C’est la première fois que ce lieu apparaît dans ma généalogie.
Ce recensement m’apprend donc non seulement qu’Élisa vit à Jolimetz avec son mari, Jules RASET et leurs trois enfants, mais également que le couple accueille la grand-mère d’Elisa, Clotilde DEHOVE, désormais veuve. J’ai eu maintes occasion de m’en apercevoir : la solidarité familiale n’est jamais un vain mot chez mes ancêtres, quel que soit leur niveau social, quelle que soit leur branche !
Emmanuel, lui, est donc décédé avant 1906. Autres précisions : si l’aîné des enfants, prénommé Jules comme son père, est né à Valenciennes en 1901, les deux suivants, Eugène et Andrée, ont poussé leur premier cri au Quesnoy en 1903 et 1905, au faubourg Fauroeulx. De là à penser que leur arrière-grand-père ait pu y décéder, il n’y qu’un pas que je m’empresse de franchir en allant vérifier les décès du Quesnoy au début du vingtième siècle. Et là, bingo ! J’y trouve en effet mention de la mort d’Emmanuel DELFOSSE le 23 juin 1903 à ce même faubourg. Il y eu donc une époque, entre 1901 et 1903, où les deux grands-parents habitaient avec le jeune couple. Voici résolue la moitié du mystère. Reste à trouver la date du décès de Clotilde.
A Jolimetz ? Rien. Un nouveau déménagement sans doute. Où ? En retournant à tout hasard consulter les actes du Quesnoy, j’y trouve effectivement mention de son décès. Après un séjour de quelque années à Jolimetz dans la famille de sa petite-fille Elisa, Clotilde DEHOVE est donc finalement morte comme son mari au Quesnoy. Cela se passait le 14 février 1907. Contrairement à quantité d’autre actes, les témoins qui ont signalé le décès n’étaient en rien liés à mon arrière-arrière-grand-mère Clotilde, mais bien... le directeur et un membre du personnel de l’hospice.
Ainsi, finalement, c’est seule, loin de siens et sans doute dans un confort plus que relatif , que la septuagénaire a poussé son dernier soupir. J’en déduis qu’à ce moment, sa petite-fille, ma grand-tante Élisa MALVOISIN était décédée malgré son jeune âge. Je sais, en effet, de la voix même de ma grand-mère, que sa sœur aînée est morte pas même trentenaire après s’être jetée à l’eau pour sauver l’un de ses fils tombé dans une mare. Elle y aurait contracté une infection qui l’aurait tuée en quelques jours. Je pense que c’est ce drame qui a amené Jules RASET à confier la grand-mère maternelle de sa femme décédée à la charitable institution. Après tout, il devait s’occuper de trois enfants en bas âge. Je n’ai toujours pas identifié le lieu et la date de l'incident qui causa la mort de ma grand-tante Élisa… mais son souvenir s’est transmis jusqu’à moi puisqu’il est mon second prénom, hérité de ma tante et marraine, qui le tenait elle-même de cette tante morte trop tôt, en ce début du vingtième siècle, à quelques mois du moment où elle-même voyait le jour.
La chapelle de l'hospice du Quesnoy où mon arrière-arrière-grand-mère Clotidle DEHOVE mourut en 1907