De la généalogie à l’histoire familiale
J’ai déjà dit ici ma passion pour les jeux de cartes, les polars et les puzzles, qui tous, me semble-t-il, découlent du même besoin quasi-viscéral de mettre de l’ordre là où, initialement, règne le chaos. Il en va de même, je pense, de mon goût pour la généalogie. Retrouver ses aïeux, restaurer le lien perdu, pister l’ancêtre oublié, dénicher la tante ou le cousin méconnu, démêler l’écheveau des filiations… autant de façons de rassembler les siens, ceux d’aujourd’hui et ceux d’hier, au sein d’une cohérence invisible traversant les siècles, les frontières et parfois les océans. Au sein d’une même histoire.
Bien sûr, les embûches du chemin participent du plaisir du généalogiste, affairé à les franchir les unes après les autres dans une espèce de masochisme étranger à la plupart de ses contemporains. À l’adrénaline de la quête succède alors celle de la victoire, toujours provisoire, toujours partielle, car toute découverte suscite automatiquement d’autres interrogations, d’autres recherches, des hypothèses nouvelles et des fouilles recommencées. C’est que, par essence et contrairement aux jeux de cartes, au roman policier ou au puzzle, la chaîne des générations n’a pas de fin. Elle compte par contre d’innombrables carrefours qui deviennent à leur tour autant de pistes infinies. À suivre. Ou pas. Il serait, en effet, profondément illusoire d’ambitionner reconstituer l’entièreté de sa généalogie. Tout au plus trois ou quatre cents ans s’offrent-ils à l’exploration de qui ne descend pas de famille illustre, mais, à lui seul, ce terrain de jeu réserve suffisamment de noms, dates, lieux, découvertes, échecs et surprises, pour occuper frénétiquement bien des heures, des semaines et des mois. Des années même, voire des décennies.
Pour pimenter l’aventure, certains décident en prime de coucher leurs découvertes sur papier, non plus seulement en fiches individuelles et arbres généalogiques, mais bien en mots. Conter la quête, sa progression, les branches recomposées et les voies sans issues, mais aussi tenter de reconstituer l’histoire, c’est-à-dire le milieu social, la profession et la vie quotidienne de chacun des protagonistes dans un contexte historique donné, dénombrer les naissances et les deuils pour approcher au plus près leur évolution psychologique : la tâche est d’envergure. Périlleuse aussi car nulle certitude ne pourra être acquise pour la plupart des faits remontant à plus de cent ans. J’ai néanmoins décidé de m’y atteler. Souhaitez-moi bonne chance !