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Journal d'une mamy-boomer
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  • Soixante ans : une page qui se tourne et l’envie de partager les événements, les impressions, les sentiments de cet âge nouveau, commun à tant d’autres issus du baby-boom. Pas encore vieux, plus vraiment jeunes, qui sommes nous ?
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28 mars 2014

Apocalypse

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Sur la cheminée de ma grand-mère, il y avait deux vases, dorés, brillants, d’une curieuse forme allongée, avec des décors gravés à volutes et deux dates : 1914-1918. J’ignorais alors qu’il s’agissait d’obus et qu’ils avaient été offerts à mon grand-père en souvenir de son frère Rodolphe, mort dans les premiers jours de l’offensive décisive des Flandres, c’est-à-dire dans les derniers jours de la guerre.

J’ignore ce que les deux vases sont devenus, mais il me plaît de savoir que d’engins de mort des artistes ont a pu créer des objets de décoration, beaux et profondément signifiants. Inversement, cela me fait mal de savoir que, la semaine dernière, deux ouvriers ont sauté sur l’un de ces obus oubliés, enterrés dans la terre meuble, où ils ont attendu près de cent ans avant d’exploser. Ironie de l’histoire : ces hommes venaient de Turquie et de Bulgarie, deux pays qui soutenaient l’Allemagne au temps du conflit. Et parce qu’ils ne sont pas belges, leurs familles ne seront pas indemnisées comme victimes de guerre mais seulement comme accidentés du travail.  

Chaque année, des centaines d’obus sont ainsi retrouvés aux emplacements des anciens champs de bataille. C’était encore le cas hier matin à Incourt, en Brabant wallon.  Nulle victime cette fois, mais les risques sont grands de connaître encore de nombreuses explosions à retardement tant le pays fut bombardé en ces temps de fureur et de rage, comme en témoigne ô combien cruellement la série « Apocalypse » du mal-nommé producteur Louis Vaudeville.

Lorsqu’elle est passée sur la RTBF, je n’avais pas souhaité regarder : je craignais d’être bouleversée par ce carnage des tranchées d’une guerre qu’on croyait la « der des der ». Mais les éloges recueillis m’ont incitée à changer d’avis lorsqu’elle a été programmée sur France 2 qui a déjà diffusé quatre des cinq épisodes. Et je ne le regrette pas. D’abord, parce que j’ai appris beaucoup de faits que l’ignorais ou n’avais jamais vraiment compris, mais surtout parce que le travail de récolte, de restauration, de colorisation et de sonorisation des films de l’époque nous donne à voir cette guerre avec une force d'évocation jamais atteinte, même par le cinéma, ne fut-ce que parce qu’il s’agit de témoignages authentiques et non de reconstitutions.

Alors, certes, difficile d’assumer le fait que tous ces jeunes hommes - soudainement si proches malgré les cent ans qui nous séparent - sont morts depuis longtemps, souvent tragiquement, parfois peut-être le jour-même où ils furent filmés ! Difficile aussi de savoir que leurs familles les ont pleuré, que leurs enfants ont grandi sans père et sont morts à leur tour parce qu’un siècle a passé. Mais, en même temps, la prouesse technique qui, un peu à la manière d’un journal télévisé, nous fait presque toucher du doigt le conflit et ses acteurs, nous offre surtout une formidable occasion de mieux « sentir » l’époque, la vie quotidienne des soldats embourbés dans les tranchées, l’angoisse, la souffrance et la mort. Dès lors, il me semble que c’est presque un devoir civique de regarder cette série. Elle ne peut, en effet, que distiller chez le spectateur une farouche volonté de Paix, donc de réconciliation à tous les niveaux de la société. Un message à réfléchir en ces temps d’élections françaises et bientôt belges et européennes ! 

NB. France 2 réduisant l'accès à ses bandes annonces pour les téléspectateurs étrangers, je ne peux vous proposer celle d'"Apocalypse". Dommage ! Plus que mes photos de famille, elle disait l'horreur.  

Englebert Auguste 14-18

Mon arrière-petit-cousin Auguste (portant la pancarte) était affecté au transport de munitions de l’Ouest de la Belgique vers Dunkerke et Calais. S'il s'en est sorti vivant, il est mort jeune, à 46 ans, des suites des privations de la guerre.

1918 - Maurice Blomme

Les survivants : mon grand-oncle paternel, le parrain de mon père (sous la croix droite) et l'un de ses neveux (sous la croix à gauche) à Dieppe, au lendemain de l'Armistice 

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Commentaires
N
J'en avais bien sûr entendu parler, de cet "artisanat de tranchée", c'est fascinant à quel point la nature humaine peut réaliser les plus belles autant que les pires choses. La série "Apocalypse", je l'ai regardée, je ne voulais surtout pas la rater ! Très riche d'enseignements, très émouvant, très documenté, et forcément très réelle. Le monde a bien changé depuis ; ces jeunes hommes étaient tellement courageux. Pendant que je regardais, je ne pouvais m'empêcher d'imaginer ce qu'il en serait si cela avait dû se produire aujourd'hui... Je n'ai tout simplement pas le sentiment que nous avons un sens aussi aigu du patriotisme, du courage, de la patience.
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G
C'est effectivement une magnifique série documentaire. Un travail incroyable en amont! et le plus - à mon sens - c'est que les faits sont racontés en détails et que l'on comprend tout :)
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B
J'ai regardé aussi ces épisodes et j'attends les prochains. J'ai beaucoup appris, alors que je croyais connaître beaucoup sur cette terrible période.<br /> <br /> Quel gâchis, toutes ces vies fauchées, ces jeunes vies... Et j'admire ceux qui sont revenus et qui ont su reconstruire leur vie, se marier, avoir des enfants, reprendre un travail, payer leurs impôts, voter, ....<br /> <br /> Bonne soirée.
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M
Je ne savais pas qu' "Apocalypse" était passé à la RTBF 500 heures d'archives exploitées et valorisées pour aboutir à ces épisodes si exceptionnels qui soulignent bien une guerre "industrielle et chimique" qui a embrasé toute l'Europe. Leçon d'histoire pour beaucoup qui ignoraient bien des aspects du conflit : il n'y a pas eu que des batailles en France dans la Marne ou la Meuse. Juillet 17, en Belgique, c'est la bataille de Passchendaele et la première utilisation par les Allemands du "gaz moutarde". <br /> <br /> Vous traduisez fidèlement le ressenti du spectateur : A 28 ans, mon arrière grand-mère était veuve à cause de cette guerre. Je suis heureuse qu'elle n'aie pas eu accès ou connaissance de ces images si bouleversantes qui auraient ajouté à son chagrin. <br /> <br /> Pour ce qui est des obus décorés, certains soldats ont développé tout un artisanat de tranchée en transformant leurs objets du quotidien en production artistique. Mon aïeul a laissé, précieux souvenirs, un crucifix, un coupe papier et un porte-plume élaborés, sculptés, ouvragés à partir de douilles en cuivre. Voir sur Wikipédia l'article consacré à l'Artisanat de tranchée (qui était même organisé par l'autorité militaire !). A vous signaler aussi, que la thématique du festival War on screen du 1er au 5 octobre à Châlons en Champagne sera la Première Guerre Mondiale. Outre les films, il semblerait que des expos, des conférences, etc... soient au programme. Des éléments qui permettront d'affiner nos connaissances sur cette période douloureuse. <br /> <br /> Merci Mamilouve pour l'hommage que vous rendez à ces soldats.
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